dimanche 26 août 2018

Les Îles Vénézuéliennes


Les Îles Vénézuéliennes

Los Roques

8 Août

Nous avons pris le large pour une traversée de 290 MN vers un petit groupement d’îles qui se nomment Los Roques. Nous n’avions pas fait de navigation de nuit depuis décembre et il fallait se donner un petit coup de pied dans le derrière. Je comprends un peu les navigateurs qui s’incrustent à un endroit, et qui n’osent plus repartir après avoir eu un trop long temps d’arrêt sans naviguer…

Cette traversée fut une de mes plus belles et des plus faciles! Un beau vent doux (10-15 nds) de l’est nous a porté vers notre destination, sans trop de vagues, sous un soleil magnifique et des nuits étoilées. Pour la première fois, je n’ai pas été malade, et on a même assez bien dormi dans nos quarts de repos. C’était encore une fois magique! Nous avons levé l’ancre mercredi en fin de journée pour planifier une arrivée samedi matin, ce qui nous donnait une marge de manœuvre si nous étions plus lents que prévu. Il fallait arriver de jour car les obstacles sont nombreux dans les Îles de Los Roques. Nous avons du même ralentir en réduisant les voiles dans la dernière nuit afin d’arriver après le lever du soleil.

11 Août

L’ile principale ou nous devions atterrir est Gran Roques. Elle porte bien son nom car elle est constituée de grands rochers! Et au pied de ceux-ci, un joli petit village multicolore, construit directement sur le sable. Les gens se promènent pieds nus dans les rues, faites de sable fin. Les iles de Los Roques font parties du Venezuela. Nous avions lu sur des blogues que contrairement au pays sur le continent, il était sécuritaire de s’arrêter ici. En aucun temps nous souhaitions se rapprocher des côtes vénézuéliennes car nous avions appris que l’instabilité politique et économique avait amenés des pirates qui attaquaient sans scrupules des bateaux de plaisance.  Nous étions donc un peu sur nos gardes à notre arrivée ici. Et bien ce n’était absolument pas fondé.

D’abord, nous avons été accueillis par 2 gardes côtiers très gentils, qui sont venus sur notre voilier. Ils venaient, très poliment, procéder à une inspection et pour remplir les papiers de séjours. Ne parlant ni anglais ni français, nous avons quand même pu communiquer avec eux. J’ai toujours de l’admiration de voir comment mon mari (je trouve toujours drôle de l’appeler ainsi!)  se débrouille bien en espagnol! Il avait appris la base lors de ses quelques voyages passés en Amérique du sud. Les gardes sont restés plus d’une heure, à remplir les formalités d’entrées et de sorties (ce qui nous évite de devoir revenir ici avant de quitter le pays, ce qui est une excellente pratique contrairement à d’autres iles visitées!), et à obtenir notre permis de croisière pour 14 jours. L’inspection consistait simplement à vérifier nos extincteurs de feu, notre balise de détresse, et de vérifier si notre radio VHF fonctionnait. Ensuite ils ont accompagné mon capitaine aux bureaux de la garde côtière pour un premier paiement, et continuant à l’accompagner aux bureaux d’immigration pour les estampes dans nos passeports. Entre temps, ils ont pris la peine de lui faire une petite visite du village. Après s’être délesté de $124US et de consacrer à peine 2h aux formalités, nous étions libres de se promener partout dans les iles de cette magnifique archipel, pour 2 semaines. Nous avions lu que les formalités étaient longues et pénibles, comme quoi il ne faut pas toujours se fier aux expériences des autres!

Les habitants sont accueillants et souriants. Ils nous saluent gentiment et on ne se fait pas regarder de travers en aucun temps. La barrière de la langue m’empêche de leur parler comme je souhaiterais mais j’ai rencontré une jeune femme qui parlait un peu anglais. Nous avons pu échanger enfin. Elle vient du continent et a marié un jeune homme qui vient de Los Roques. Le couple et leur bébé font donc souvent la navette entre le pays et l’archipel ici. Elle me confirmait que la situation politique au Venezuela n’est pas reluisante et qu’elle est inquiète pour l’avenir de ses enfants.  Elle m’a rassuré que les gens ne sont pas plus pauvres, ou plus violents qu’avant, mais l’accès aux produits de consommation et de nourriture est très, très limité. Pendant qu’on discutait, il y avait une distribution de vivres pour chaque famille du village. Le gouvernement envoie une boîte contenant des produits de base (huile, farine, riz) a chaque 2 semaines. Sur la boite, il y avait des inscriptions officielles du gouvernement ainsi qu’une photo du président. Le jeune père de famille me montrait cette photo avec un signe se coupant la tête…ça veut tout dire de leur appréciation de leur gouvernement… Un cargo par semaine apporte des denrées plus fraîches, mais comme il n’était pas passé encore…et bien je n’ai eu accès qu’à quelques oignons et un gros chou... Il n’y a aucune agriculture ici puisque c’est que du sable ou des mangroves qui forment le paysage des îles de Los Roques. Les hommes vivent de pêches et de l’industrie du tourisme. On voit quelques petits avions qui arrivent chaque jour du continent, amenant des touristes vénézuéliens pour la journée ou la semaine. Ces clients sont transportés par petits bateaux chaque jour sur une des magnifiques plages des iles aux alentour, et reviennent avant la nuit sur Gran Roques. Une offre d’auberges et de restaurants semble bien organisée pour ces clients à l’ile principale. 










Arriba, Soyoqui, Crasqui, Carenero, Cayo de Agua, ce sont quelques-unes des petites îles devants lesquelles nous avons mouillé. Toutes des îles inhabitées, avec de longues plages de sable fin. L’eau est de mille teintes de bleu turquoise. Les îles sont entourées de récifs de coraux, donc de très belles plongées à faire. La faune est riche et on a vu des milliers de poissons de toutes les couleurs, et parfois des gros! Dans les coins ou nous étions isolés, on en a profité pour sortir les harpons. On adore tous les deux allé chasser. L’eau n’est pas aussi claire que les eaux cristallines des Bahamas mais elle est chaude et agréable. On déplore la présence parfois de minuscules méduses. Heureusement elles ne brulent pas au contact de la peau. Ici on rencontre très peu de voiliers et de rares bateaux à moteur provenant du continent. Nous sommes vraiment isolés et on apprécie cette solitude. J’apprécie vivre dans (ma plus simple expression) et de nager toute nue… Je n’avais jamais imaginé vivre une vie de nudiste un jour, comme quoi il ne faut jamais dire jamais! On passe nos journées en maillot de bain ou simplement nus. L’avantage est que ça ne fait pas beaucoup de lavage…  

De nombreux coraux et surtout des hauts fonds de sable partout, rendent la navigation à risque. Nous sommes traumatisés de notre échouage à Spanish Wells aux Bahamas et du bris du safran. Par conséquent, nous sommes extrêmement vigilants, et oui, pas mal nerveux!  Les cartes ne sont pas exactes quant à la profondeur des eaux, le GPS n’est pas toujours précis quant à notre position par rapport aux obstacles. C’est donc avec les yeux sur le profondimètre et une surveillance constante sur les différentes couleurs de l’eau qu’on approche les mouillages lentement mais surement. Aucun incident n’est arrivé jusqu’à date, mais ancrer avec parfois 2 pieds seulement sous la quille, on n’aime pas trop ça.






20 Aout

Aves de Barlovento et Isla Larga sont d’autres petites îles plus à l’ouest qui appartiennent aussi au Venezuela et où nous avons passé quelques jours. Des îles inhabitées, entourées de récifs qui protègent bien des vagues du large, rendent les mouillages confortables. Nous sommes exposés au vent (il fait moins chaud et c’est excellent pour l’éolienne!) mais pas exposés aux vagues, c’est donc parfait! On se retrouve au milieu de plusieurs petites iles de sable, et on n’en revient pas d’avoir la chance d’être ici! Il y a beaucoup d’oiseaux marins qui vivent sur ces iles. On les entend piailler, on les voit virevolter autour du bateau, on les voit plonger dans l’eau, c’est assez impressionnant. Ils sont des milliers. Je ne pourrais les nommer car il y a différentes sortes mais je reconnais les plus gros, d’immenses pélicans, qui plongent toute la journée dans l’eau remplie de poissons, un buffet à volonté tellement la mer est généreuse ici.

Nous avons, à nouveau, été visités par des gardes côtiers sur Isla Larga. Aucun habitant mais 3 jeunes gardes embauchés par le gouvernement vénézuélien, qui vivent isolés sur cette petite ile, et qui accueillent les rares bateaux de plaisance qui passent. Ou qui s’assurent que les quelques pêcheurs qui viennent jusqu’ici font leur travail dans les règles de l’art. Ils assurent la sécurité des lieux! Ils ont été très gentils et polis, et on appréciait que celui en charge parle assez bien anglais. Ils viennent se faire porter en bateau pour une période de 45 jours, avec leurs vivres, sans autres supports. Ils retournent sur le continent pour quelques jours et reviennent ici ensuite. Le responsable aime son travail, trouve que c’est un très bon job, qu’il fait depuis 4 ans. Ils ne semblent pas être beaucoup occupés, et n’ont pas trop de distractions, mais ils sont charmants et semblent satisfaits de leur sort.
Nous avons connu le bonheur de vivre pendant 2 jours devant une minuscule île qui se nomme Long Island. Lorsqu’on s’imagine des images tropicales merveilleuses, lorsqu’on rêve d’un voilier devant une plage déserte, sur une belle eau turquoise, lorsqu’on fantasme à se prendre pour Robinson Crusoé sur son île, et bien c’est ici! Je n’en crois pas mes yeux… c’est d’une beauté indécente! Je suis gênée de ne pouvoir partager la vue qu’on a avec vous!  Stéphane a sorti son kite surf, j’ai joggé sur la plage, on a nagé, plongé, chassé les poissons, on en a bien profité.

Nos journées passent vites, même ici ou le temps semble être arrêté. Chaque jour on part explorer dans l’eau, on va prendre de grandes marches sur les plages, on entretien le bateau ou on prépare notre prochaine navigation sur une autre ile. Je passe beaucoup de temps dans l’eau et j’adore ça. J’aime ce que la nage m’apporte comme bien être.















Entre les baignades, la préparation des repas, quelques lectures, l’apéro en fin d’après-midi tout en jouant au Cribble ou au Backgammon, un bon souper en regardant le soleil se coucher, et le soir, on regarde des séries enregistrées. Nos journées passent vraiment très vites. On ne s’ennuie pas. Je pense parfois à nos proches qui travaillent et qui ont une vie de fou… et je me sens tellement privilégiée de vivre la vie que je mène présentement, en bonus avec l’homme que j’aime!  Je ne voudrais plus retourner en arrière et reprendre cette vie stressante…

Ça fait 2 semaines que je n’ai pas fait d’épicerie et qu’on a aucun accès à de l’approvisionnement mais on mange encore super bien. J’ai réussi à tenir des fruits et légumes frais et de la salade pour une semaine. Maintenant, un gros chou nous permet de se faire de bonnes salades (mélangé avec des pommes vertes qui se gardent plus longtemps et des canneberges séchées, c’est excellent). Des pommes de terre rissolées dans du gras de canard (récupéré d’un restant de gésiers de canard en conserve). Du poisson frais et des langoustes parfoid, un peu de viande qui reste congelé dans le congélateur. Du riz assaisonné de différentes façons. De la sauce a spaghetti préparée à Grenade. Des gnocchis (scellés sous vide qui se gardent des mois) au bacon, oignons et à la crème, des sandwiches, des wraps, des pizzas, des omelettes, on a tout ce qu’on a besoin! J’ai toujours du lait UHT et des boites de crème UHT dans mes coffres. J’ai découvert des yogourts UHT qui se conservent aussi à température ambiante, ce qui est bien pratique lorsqu’on a un très petit frigo. J’ai trouvé de l’humus en conserve. Mélangé avec une grosse cuillère de pesto, ça rehausse le gout et ça accompagne bien notre bière à l’heure de l’apéro. J’ai toujours des biscottes et des craquelins pour accompagner des pâtés en conserve, ou des fromages gardés au congélo. J’ai aussi toujours des réserves de légumineuses, fruits et légumes en conserves, soupes et potages en boite ou en sachet, qu’on utilise que très rarement.  Et pour ce qui est de notre unique bière quotidienne, ou le vin, on prévoit notre coup. Mon capitaine s’assure de tenir une bonne réserve. Il a encore ses meilleurs vins de sa cave à Candiac à bord… Bref je vous affirme que bien manger et bien boire, c’est important pour nous et on ne lésine pas sur ce bonheur. 

On pense à nos amis de Frimousse qu’on a laissés à Grenade. Ils restaient plus longtemps et viendront nous rejoindre dans quelques semaines. On pense à nos amis de Rodignard qui préparent leur voilier pour de plus longues traversées. Ils devraient quitter Grenade à la mi-septembre pour se diriger vers nous et venir nous rejoindre quelque part dans l’ouest. Nous apprécions beaucoup avoir ces amis, mais présentement, on profite du temps précieux, juste à nous.

La pêche

J’aimerais partager plus en détail une de nos activités préférées : la chasse sous-marine! C’est très demandant physiquement mais combien gratifiant. Quel bonheur de prendre des beaux poissons, et de les manger frais.

D’abord chasser la langouste. C’est plus facile que le poisson car elle ne bouge pas trop, elle! On les trouve cachées sous les têtes de corail ou sous des roches. Il faut les chercher, on n’en voit pas souvent. On doit plonger à répétition, en rasant le fond, dans de 4 à 8 pieds d’eau, pour les trouver. Notre œil est maintenant plus aguerri pour les apercevoir. On se concentre sur les antennes. La langouste se tient reculer dans le fond d’un trou mais souvent les bouts de ses antennes sont visibles. C’est là qu’on doit retenir notre souffle, se planter au ras du sol, étendre notre sling (dispositif en caoutchouc qui s’étire pour tendre au maximum et ensuite lancer le harpon sur la cible), et tirer.  Malgré que la langouste ne bouge pas vite, ça nous arrive de la manquer. Dans ce cas, elle se cache encore plus profond, et c’est presqu’impossible de la retrouver. Quel joie d’en rapporter quelques-unes au bateau. C’est assez facile de les décortiquer. C’est une magnifique bête et on apprécie beaucoup son gout fin, à la texture d’une queue de homard.
Le poisson par contre nous donne beaucoup de fil à retordre, c’est pourquoi lorsqu’on en attrape un, la satisfaction est à son comble! Avec un livre, on a d’abord appris à choisir les bons à manger, parmi les centaines qui nagent devant nous. Les gros poissons perroquets et ceux de la même famille, ainsi que tous ceux qui se nourrissent de corail ne sont pas comestibles. La chair est trop coriace et ils sont à risque de contenir la ciguaterra, bactérie qui atteint le système nerveux. Ensuite on élimine tous les petits poissons de moins de 12 po. Une fois dépecés, ils ne donnent que quelques bouchées. C’est tellement difficile pour Stéphane de décortiquer des poissons tropicaux avec leurs peaux très dures, les écailles, les nageoires indélogeables, et les arêtes à retirer, que ça ne vaut pas la peine et qu’on renonce aux petits. On se concentre donc sur les gros Vivaneau, Snapper, Porgy, Tazar, Grunt (désolée je connais les noms en anglais seulement…). Mais les gros nagent vites, trop vite! Et ils se cachent dans les coraux, ils sont fins! Les coraux se composent d’une multitude de formation dures comme la roche, avec des cavités, des crevasses, et un labyrinthe de trous communiquant entre eux. Lorsqu’on approche les petits poissons, ils restent tous devant nous. Comme s’ils savaient ne pas être une proie pour nous. Mais dès qu’on aperçoit un beau grand poisson qui nous donnera de bons filets dignes de notre assiette, et bien ils disparaissent aussitôt, en entrant par un trou et en s’y cachant, ou plus insultant encore, ils entrent par un trou et ressortent beaucoup plus loin, presqu’en nous narguant… Et lorsqu’on réussit finalement à tirer sur un et a le harponner, il arrive régulièrement  qu’il se décroche du harpon et qu’on le perd. Si on a tiré dans sa chaire plus molle, celle-ci déchire et le poisson s’en va mourir dans le fond d’un trou. Quel dommage. Il m’arrive aussi que je vise un poisson juste sous mes yeux, mais que je renonce à tirer car celui-ci est placer devant une grande crevasse et que je perdrais mon harpon dans le trou, ou que le poisson se débâterait avec mon harpon planté dans le corps et entrainerait celui-ci dans le fond d’un trou inaccessible. On doit être patient, persévérant, et habile pour chasser. On doit également surveiller les barracudas menaçant qui tournent souvent autour. En plus de nos slings hawaïennes (qui fonctionne sur le principe du tir à l’arc mais on doit être à un maximum de 2 à 3 pi de la cible pour que ça transperce) on a fait l’acquisition d’un harpon-fusil. C’est le même principe de bandes de caoutchouc qu’on arme pour lancer un harpon mais la force est supérieure et on peut atteindre une cible à 5-6 pi de distance. On alterne et on s’échange les jouets…mais comme je suis incapable d’armer le fusil car ça prend plus de force de bras pour remettre le dispositif bien bandé, je dois humblement avoir l’aide de mon homme pour me supporter dans cette activité.
Bref la pêche, est un sport exigeant, mais tellement fascinant. On adore jouer dans l’eau et aller voir et revoir les coraux et les poissons. Avec la chasse, ça rend les plongées encore plus stimulantes, et gratifiantes lorsqu’on ramène enfin un poisson dans notre dinghy!








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