dimanche 24 février 2019

Panama Les Iles Perlas et le Grand Départ


11 Février

Après 37 jours passés au mouillage de l’Ile Perico (Las Brisas), près de Panama City, on lève ENFIN l’ancre vers de plus beaux rivages. Je dis ENFIN car ce n’était pas très agréable… On ne peut pas se plaindre si on se compare aux québécois qui vivent un hiver d’enfer pendant que nous, ici sur la côte Pacifique, il faut très beau et chaud chaque jour!  Toutefois, l’eau n’est pas très propre donc on ne peut pas faire de l’eau, en plus de rendre la coque épouvantable. La poussière de la ville rend le bateau et les cordages noirs de saletés. Mais surtout, la baie est très exposée au vent et on y voit des vagues de 2 à 3 pieds la plupart du temps. Ça brasse! Et que dire de nos déplacements en dinghy! On se fait mouiller à chaque sortie, sans parler du quai à dinghy qui n’est vraiment pas commode. On met notre annexe à risque de se briser à chaque fois qu’on l’accroche à l’étroit et petit espace où il est permis d’aller. On nous oblige à s’accrocher les uns par-dessus les autres, derrière un ponton flottant très proche des roches. Lorsque la marée descend, nos hors-bords frôlent les rochers dangereusement. Les gens responsables du quai sont inhospitaliers avec les navigateurs et appliquent des règlements absurdes, qui nous donnent des ennuis.

Mais malgré ces inconvénients, c’était gratuit et pratique. La longue promenade aménagée le long de la rive est magnifique et j’y faisais mon jogging régulièrement. Une boutique de très bons vins (Felipe Motta) était à proximité. Et le bus qui nous amène en ville et au centre commercial Albrook passe souvent. Cet immense centre d’achat avec 2 grandes épiceries, des quincailleries, pharmacies et des centaines de boutiques, on se rappellera. Je n’ai jamais été aussi souvent dans un centre d’achat que dans ces dernières semaines. J’ai une écœurantite aigue du magasinage… mais c’est bien pratique lorsque nous avons des besoins.  Bref vivement partir d’ici!

On s’est arrêté à Taboga, une petite île touristique, toute proche de la ville. On a pris le temps de marcher un peu sur l’ile mais on a surtout mis beaucoup d’efforts pour gratter la coque. Passer autant de temps dans des eaux polluées sans bouger, la coque et l’hélice étaient remplies d’algues et de coquillages. On met nos wetsuits (l’eau est nettement plus froide ici contrairement aux Caraïbes ou sur la côte Atlantique) ainsi que nos masques-tubas, et on doit gratter tout ce qui est sous l’eau, jusqu’au-dessous de la quille. Ça nous prendra 3-4 jours à raison de quelques heures à la fois. Stéphane devient très fort à garder son souffle et rester sous l’eau longtemps. On frotte avec des grattoirs et des genres de récurant (Scottbright).  C’est presque un sport extrême, très exigeant. Pour ma part, je me contente de la ligne de flottaison et du premier pied sous l’eau car je n’ai pas l’endurance de faire plus loin…






Les Iles Perlas

Ces îles, plus de 35 MN au sud du continent, appartiennent au Panama. Elles sont très peu habitées et présentent des paysages sauvages de toute beauté. L’eau est fraîche et bonne, quoi qu'un peu trouble. Les plages sont désertes. Les forêts sont remplies d’oiseaux qui jacassent et qu’on voit plonger dans l’eau pour pêcher. Ces îles sont pourvues de forêts si denses qu’il est malheureusement impossible d’y pénétrer et d'aller les découvrir.

Nous avons mouillé avec Frimousse et nos nouveaux amis de Vagabond dans les îles Contadora, Mogo Mogo et Espiritu Santo (ça sonne exotique n'est ce pas!). Anisia (suisse française) et Thomas (suisse allemande) du petit voilier jaune Vagabond, sont très sympathiques. Nous les avons connus dans le canal et on les a côtoyé a Panama. Lui navigue depuis 30 ans et a déjà quelques grandes traversées derrière la cravate, dont le Pacifique. Il est puriste et simpliste comme navigateur, mais riche d'expériences et d'histoires a raconter. Elle, a débuté la vie en mer il y a quelques années, comme moi, et tente de s'adapter du mieux qu'elle peut. Elle a beaucoup voyagé, elle a vécu en Inde, en Afrique, et elle aussi a beaucoup d'histoires a raconter. Elle m'apprend a cuisiner des curry indiens délicieux et on aime partager de belles soirées en leurs compagnies. Le soir du 15 février, pour souligner l'anniversaire de Stéphane, on a partagé un souper sur Ambition, tous les six. J'avais fait le gâteau préféré de mon homme, un fondant au chocolat! Et nous avons dansé toute la soirée jusqu’à minuit! Ce fût une magnifique soirée et une belle rencontre!



Les mouillages sont superbes, et surtout bien tranquilles. Nous apprécions les nuits calmes et sans mouvements. Le jour, on se précipitent pour aller chasser. Stéphane et Anisia sont les experts a la chasse sous-marine. Chacun avec leur fusil-harpon, ils nous rapportent des poissons qu'on mange le soir même. Stéphane a pris 3 fois des supers beaux amber jacks. Sophie et André préfèrent pécher a la ligne en dinghy. Un soir, nous avons fait une dégustation de 4 sortes de poisson, qu'on a pu ensuite comparer et dire lesquels étaient nos préférés. Ces 2 semaines passées (en vacances) nous ont faites du bien.




Un autre soir, nous avions convié d'autres navigateurs français ainsi que nos amis pour un BBQ sur la plage. On a fait un feu et on a fait griller nos prises du jour. Tout le monde avait péché cette journée la et c'était très agréable de partager ce festin cuit directement dans la braise, et de discuter tous ensemble. André a sorti sa guitare, Sophie son ukulélé, et on a chanté autour du feu toute la soirée. On leur a fait nos bonnes vieilles tounes québécoises qui ont été bien appréciées par les européens. Une soirée magique! On vit des moments vraiment exceptionnels. 

21 Février

De retour a Contadera, cette île est la seule touristique du coin, avec épiceries correctes et wifi pas trop pire. C'est ici qu'on étudie la météo. On fait les derniers préparatifs pour la plus longue traversée sans toucher terre que nous ferons de notre vie! On vise les Marquises, en Polynésie française: 3 700 milles nautiques (6 660 km!!!) Ceci est en ligne directe, mais on devra faire des détours pour aller chercher le meilleur vent possible, ce qui rallongera certainement quelques centaines MN de plus. Notre défi ne sera pas d'affronter des tempêtes ou du mauvais temps (quoique nous ne sommes jamais a l'abri de dame nature!) mais plutôt de traverser de grandes zones sans assez de vent. On étudie les statistiques des 20 dernières années sur les vents dominants. On se documente. On connait la grande zone de convergence entre les vents du nord et les vents du sud au niveau de la ligne de l'équateur. On observe les vents faibles de cette zone depuis des semaines et elle demeure exceptionnellement grande pour ce temps de l'année...

On calcule une moyenne de 5 nœuds par heure, donc 120 MN par jour. En principe ça devrait nous prendre un peu plus de 30 jours pour s'y rendre. Malgré les ajouts de bidons de diesel mis sur le pont, nous avons une autonomie de moteur de seulement 6 jours et 6 nuits. On devra être stratégique, et patients, très patients! C'est notre crainte de ne pas pouvoir avancer. On devra trouver des moyens d'user de notre patience...

J'ai des livres électroniques en masse, de la bonne musique, des films et des séries, des jeux. Mais 30 jours sans aller a terre, sans trop bouger, ça va me rende dingue! Moi qui a toujours besoin de faire de l'exercice, il faudra que je sois créative pour me dépenser sur le bateau, en pleine mer! Pour la bouffe, on a des réserves pour des mois. J'ai des repas frais déjà préparés pour nos premiers jours. J'ai 24 repas mis en pots Masson, tout fait maison a Panama. J'ai des boites de conserve et denrées non périssables en quantité industrielle. J'ai des bons plats en sachets lyophilisés, comme pour les astronautes. On produit notre eau de façon illimitée. Bref on a de quoi tenir longtemps.

Nos batteries et nouveaux panneaux solaires fonctionnent a plein régime donc notre production d'énergie est parfaite. Le bateau est en ordre: tout est réparé, chaque vis a été ajustée, chaque poulie a été huilée, chaque cordage et voile a été inspecté. Nous serons en mesure de communiquer presque a chaque jour avec notre routeur, notre cher ami Philippe. Il nous donnera la météo selon la position ou nous serons, et nous guidera pour maximiser le potentiel du vent et des courants. Je communiquerai ma position et vous pourrez nous suivre presque en direct sur le blog, par le lien Shiptrack. On est bien préparé!

24 février

Ça y est, on part demain! Nos chers amis de Frimousse et nous avons conjointement décidé de partir ensemble. Il semble avoir une légère bouffée de vent qui part du golf du Panama et qui avance vers les Galapagos environ au même rythme que nous avancerons. On tentera de profiter le mieux possible de ces vent légers en utilisant notre Genneker (grande voile qui ressemble a un parachute et qui peut nous propulser si la brise venant par l'arrière est assez soutenue). On est quelque peu excisés car on a hâte de se retrouver en Polynésie française, mais le chemin pour y parcourir fait peur. Ça donne un peu le vertige de penser que nous ne pourrons compter que sur nous même pendant si longtemps... et qu'on mènera Ambition 1 aussi loin! Nous sommes prêts, mais conscient du défi qui s'annonce. Un défi physique et psychologique. Pendant la traversée, on aura un rv quotidien avec nos amis de Frimousse sur la radio amateur. On sera en mesure d'envoyer un rapport de position, que vous pourrez suivre sur le lien (Ou sommes nous). Et ma famille sera informée presque chaque jour de notre évolution.

J'ai pu faire un long appel-vidéo avec mes filles. Une a Montréal, l'autre a Vancouver. Elles ont de beaux projets, des vies heureuses et bien remplies, elles sont bien entourées, je ne peux pas m'en faire pour elles. Moi qui pensait que je serais triste de leur dire au revoir pour ce départ de plus de 30 jours. Elles ont le tour de rendre les discussions hilarantes et remplies de joie. Les gros fous rire qu'on a eu en découvrant les effets spéciaux sur Messenger! Ça n'a pas de prix... Je vous aime les filles! Vous êtes exceptionnelles! Nous voici faisant les clowns!





Aujourd'hui j'en profite pour aller a terre. Aller jogger pour me dépenser un peu. Aller au petit bar pour profiter du wifi. Je respire les fleurs et les arbres comme jamais car je sais que ça prendra longtemps avant d'en profiter. Je me conditionne au sevrage de la connectivité: pas de Facebook, pas de Presse+ a chaque matin, pas de longues discussions suer la tablette avec ma mère, mes amies...
Allez, a bientôt, ça passera vite! J'ai hâte de vous raconter notre expérience!