lundi 13 novembre 2017

Traversée vers Cape Verde

4 Novembre

En laissant Martine, nous avons tout de suite pris la mer pour se rendre au  Cap Vert. Dernier groupement d’Iles avant une nouvelle Transatlantique vers les Caraïbes, laquelle cette fois ci j’y participerai. Nous avions une fenêtre météo favorable de partir sur le champ, sinon nous devions attendre 1 semaine car des vents puissants étaient attendus dans les Canaries d’ici 48h. Nous souhaitions avancer rapidement et sortir de cette dépression avant qu’elle nous rattrape. Le départ fût à 13h cette journée, quelques heures après que nos amis de Frimousse eussent quitté leur mouillage pour la même direction.

Nous avions eu le temps de faire plusieurs provisions pour le prochain mois, sachant qu’au Cap Vert, l’approvisionnement n’est pas aussi varié et de qualité qu’en Europe. J’ai pris le temps de préparer plusieurs repas faciles à servir en navigation, ce qui est toujours apprécié les premiers jours avant que l’amarinage s’installe ou quand ça brasse un peu. Nous étions à nouveau bien guidés par notre collaborateur Philippe pour les rapports météo quotidiens. Rien d’inquiétant se présentait sur notre route, ce qui nous rassurait.

Il s’est avéré qu’on a manqué de vent! Nous avons dû faire du moteur la première journée, ainsi que la 3e, 4e et 5e journée… Un vent léger plein Nord (au lieu de Nord-Est tel qu’on s’attendait) nous portait vers le Sud mais trop arrière, ce qui rendait la voile du Genneker pas suffisamment performante.  Nous avons donc alterné entre le moteur lorsque le vent était sous les 7kts et au Genneker dès qu’il levait a 8kts et plus. Nous sommes rendu vraiment bons à lever cette voile de jour comme de nuit, ayant eu l’opportunité de pratiquer souvent les derniers jours!

Nous avons avancé vraiment tranquillement, une moyenne de 4,5kts, sur une mer relativement calme. On a vu de la houle de 2 a 3m mais tellement espacée que c’était facile à prendre.  Malgré tout, les premiers 3 jours sont encore difficile pour moi. Nauséeuse, il est impossible pour moi de rester à l’intérieur, sauf pour aller me coucher. J’installe mon lit dans le carré, en plein milieu du bateau ou ça bouge le moins, bien enfoncée dans les coussins afin d’éviter le plus possible l’effet du roulis, et j’essaie de dormir aussi souvent que je le peux. J’ai la bouche très sèche dû aux médicaments que je prends je crois. Je me sens moche et somnolente. J’évite café, thé, alcool évidemment, et tout ce qui est épicé, et sucré. Ce qui me fait du bien c’est le salé. Des nouilles au bouillon de poulet, des chips, et des grignotines salées. Je mange très peu à la fois, mais plus souvent. Après 3 jours, je me sens revivre. Je reprends un peu l’appétit, et par conséquent de l’énergie. 

La vie à bord pendant une traversée est très basique. Les besoins primaux doivent être comblés et on ne s’attarde pas à autre chose. Manger, dormir, faire sa toilette, et bien sûr, se concentrer pour une navigation sécuritaire. Notre routine s’installe rapidement maintenant. Je me couche le soir entre 19h et 20h. Je dors jusqu’à 23h. Je veille de 23h à 3h pour laisser un bon 4h de sommeil à mon capitaine. Je retourne me coucher de 3h à 6h environ. Stéphane retourne se coucher jusqu’à 9h ou 10h. Et je dors a nouveau en après-midi un petit 2h. Ça nous fait quand même de 7h à 8h de sommeil chacun, mais on se sent fatigués aux levés, car ça nous semble trop court à chaque fois, même si on se réveille tout seul, sans cadran.  Pendant notre temps de veille la nuit, il arrive qu’on somnole un peu. Une minuterie activée aux 20 min nous permet de mieux décroché sachant qu’aucun bateau ne peut être en danger de collision entre nos inspections visuelles de l’horizon.
Stéphane et moi se croisons aux changements de quarts et on ne passe pas beaucoup de temps ensemble certains jours. Par contre, on essaie de manger ensemble à tous les diners et soupers. On vit dans une bulle, déconnectés de tout, et ou l’espace-temps prend un autre sens. On vient à ne plus savoir quel jour on est. On trouve que chaque heure est longue mais finalement, au bout de la journée, on se surprend à se dire que la journée a passée vite. Moi qui a toujours été dans l’action, à accomplir une longue liste de choses à faire dans mes journées, je suis ici, en plein milieu de l’océan, a végéter, à contempler la mer, à réfléchir,  à jouer au Scrabble et aux Jeux de Mot sur la tablette, et c’est tout ce que je peux faire…

Il nous arrive de belles surprises quand même. La visite de plusieurs dauphins sautant autour du bateau, nous ravie toujours. Mais il y a aussi la nuit ou on avançait silencieusement au Genneker, et que des dauphins me surprennent à venir respirer tout près du bateau. J’avais l’impression qu’ils me soufflaient dans le cou. La nuit était noire, sans lune, donc je voyais leurs sauts dans l’eau qui faisaient bouger le plancton fluorescent. On dirait qu’ils faisaient des étincelles dans l’eau et ça brillait de sous l’eau.  Magique!

La fois ou la ligne à pêche traînait à l’eau mais qu’un oiseau marin s’est pris dans le fil! Le beau thon de 26 po qu’on a attrapé après une longue bataille qui a laissé mon homme avec les bras morts! Et qu'en préparant les filets de ce même thon, et qu’on jetait les morceaux de la carcasse a l’eau, un espadon avec sa longue épée et sa crête sur le dos suivait de près et ramassait ces restants en sautant hors de l’eau! En observant la mer, on aperçoit parfois un banc de poissons volants qui sautent tous en même temps et volent sur plusieurs mètres, pour se sauver d’un gros poisson qui les poursuit. Tout ce monde qui vit sous notre coque, et qu’on ne peut qu’imaginer…


11 Novembre

Ça fait 7 jours que nous sommes en mer! Une navigation relativement facile mais quand même, un peu fatigante par le sommeil coupé, et du fait qu'on ne peut pas bouger bien loin! Lorsqu'on sait qu'il reste seulement quelques dizaines de milles nautiques, on a hâte d'arriver. On a parti le moteur la nuit dernière pour s'assurer d'arriver en plein jour. On sort les voiles pour les dernières heures et on avance enfin rapidement. Le passage entre l'Ile de Sao Vicente (ou nous allons) et l'ile Santo Antao juste en face entraîne des vents puissants causés par les montagnes. Un venturi naturel apporte des vents forts, des rafales, des vagues toutes croches, des coups de vents qui changent de direction. Mais on fait ça avec le sourire! On se sent en contrôle de la situation. On est fiers d'arriver et surtout de l'expérience que nous avons acquise encore un peu plus. 

Nous avons jeté l'ancre dans le port de Mindelo a 16h. Ambition nous a amené en Afrique! Je capote! Nous sommes vraiment loin du Lac Champlain! On a fait ça comme des grands! Pas seuls évidemment. Notre précieux collaborateur Philippe nous a bien guidé et rassuré par ses rapports météo quotidiens. Heureusement que la radio HF a bien fonctionné et que j'ai pu communiqué avec lui chaque jour.  

Nous aurons fait 818 milles nautiques en tout. Il nous pris 7 jours et 3h. Malheureusement nous avons dû faire 70h de moteur mais nous avons pratiqué différentes stratégies en vent arrière, et nos différentes voilures. On s'en vient bons! Je pense déjà a la prochaine traversée... Ce sera tout un contrat! 2000 NM!!! Nous serons en mer pour plus de 2 semaines.... C'est long.... Mais nous avons l'avantage d'avoir tout notre temps... 


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